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Dans l’univers complexe du droit contemporain, la médiation privée et la conférence de règlement à l’amiable (CRA) se dressent en remparts contre les procédures judiciaires traditionnelles. Au cœur de litiges de plus en plus complexes, ces alternatives deviennent des stratégies de choix pour de nombreux acteurs du monde juridique.

À travers le prisme de l’expertise d’Hélène de Kovachich, avocate et médiatrice accréditée, ex-présidente du Tribunal administratif du Québec et pionnière des PRD, nous explorerons les nuances, les avantages et les obstacles liés à ces deux approches.

La médiation privée : une voie vers l’accord

Selon notre experte en médiation, « La médiation permet d’intégrer une pluralité de normes, plutôt que juste une normativité juridique. On regarde vraiment les besoins des parties, les objectifs, on trouve des solutions qui ne sont pas contraires à l’autre. Ça aboutit donc à une entente qui se veut gagnant-gagnant. »
Dans cet esprit, la médiation privée se distingue par sa flexibilité, sa personnalisation et sa rapidité. Les parties ont la liberté de choisir leur médiateur, un point crucial pour garantir un processus adapté à leur situation particulière. La confidentialité qui règne au sein de la médiation privée favorise un échange ouvert et honnête, créant ainsi un climat de confiance propice à la recherche de solutions créatives.

« J’ai présidé un dossier de médiation concernant des problèmes liés à des vices cachés lors de l’achat d’une première résidence. Les parties avaient fait intervenir la compagnie d’assurance, les ingénieurs, les architectes, le contracteur. Nous étions une vingtaine de personnes autour de la table de médiation. En l’espace d’une journée, bien préparée avec les parties, sans avoir à pointer un ou des fautifs, mais plutôt à se concentrer à identifier ce qu’il fallait faire pour régler le problème, les parties ont conclu un règlement. Tout le monde a mis un peu de soi pour trouver la solution », illustre madame de Kovachich.

La conférence de règlement à l’amiable (CRA) : un pont avec le système judiciaire

D’un autre côté, la conférence de règlement à l’amiable offre un cadre plus formel en introduisant un juge médiateur dans le processus. « La présence d’une autorité judiciaire peut être rassurante pour les parties qui ont besoin d’un cadre plus structuré pour parvenir à un accord », souligne madame de Kovachich.

« Avec une CRA, on rentre dans un rouage institutionnel. Il y a des interrogatoires, il y a des preuves à déposer, il y a tout un système juridique qui doit être respecté. »

 

L’un des aspects clés de la CRA est sa capacité à encourager le règlement rapide des différends. Notons qu’en CRA, en moyenne 79 %1 des cas aboutissent à un règlement au Québec, et dans 90 %2 d’entre eux, l’exécution des jugements est spontanée, reflétant la force persuasive de cette voie.
Une fois la solution trouvée lors de la CRA, une entente est rédigée et signée par les parties avec leurs avocats. Cette entente peut également être validée par un juge pour lui donner force exécutoire, similaire à un jugement de la Cour.

La CRA n’est plus accessible sur demande conjointe des parties depuis le 30 juin 2023. Dorénavant, le tribunal peut ordonner une CRA selon les nouvelles dispositions du Code de procédure civile.

La médiation privée

Volontaire et flexible

Les parties peuvent choisir leur médiateur.

Confidentialité élevée

Favorisant un échange ouvert et honnête.

Processus personnalisé

Adapté aux besoins spécifiques des parties.

Solutions créatives non limitées

Ententes flexibles et généralement mutuellement bénéfiques.

La conférence de règlement à l’amiable (CRA)

Présence d'un juge médiateur

Pour faciliter les discussions.

Processus structuré

Devant respecter des délais établis par le Tribunal.

Plus proche du système judiciaire

Tout en offrant une option de résolution alternative.

Possibilité de solutions contraignantes

Si les parties parviennent à un accord sous la supervision du juge.

Préparation et bonnes pratiques : clefs de la réussite

Dans l’univers complexe de la résolution des conflits, la préparation méticuleuse est souvent la pierre angulaire du succès. « La clé réside dans une préparation méticuleuse des parties, des avocats, des experts impliqués et du médiateur » insiste madame de Kovachich. Une communication efficace, une écoute active et une compréhension des processus spécifiques à chaque voie sont essentielles. Les médiateurs ou avocats (dans le cadre d’une CRA) doivent guider leur client dans la préparation de la documentation pertinente et les sensibiliser aux principes de négociation raisonnée pour favoriser des résultats mutuellement bénéfiques.

Par ailleurs, une bonne pratique en médiation souvent négligée consiste à mettre en place des mécanismes de suivi dans les accords conclus. Cette démarche permet de faciliter la mise en oeuvre des accords post-médiation. Le médiateur impliqué dans le dossier assure une transition fluide vers la réalisation des ententes, en préservant la confidentialité et en garantissant le respect des règles établies lors du processus de médiation.

Tendances et enjeux actuels : évolution des mentalités

Des réformes récentes du Code de procédure civile mettent en lumière l’importance croissante des modes alternatifs de résolution des conflits. « Nous observons une tendance émergente où les avocats plus jeunes privilégient la médiation privée, tandis que les avocats plus expérimentés se tournent souvent vers la CRA », indique madame de Kovachich. Cette évolution soulève des défis en termes de sensibilisation et de formation pour exploiter pleinement les avantages de ces nouvelles approches.

Le choix de la médiation privée ou de la CRA dépend largement de la nature du litige, des préférences des parties et des objectifs visés. Chacune de ces voies offre des avantages distincts et des défis spécifiques, nécessitant une approche adaptée à chaque situation. En s’appuyant sur une préparation minutieuse, une compréhension approfondie des processus et une volonté de collaborer, les parties peuvent tirer le meilleur parti des voies alternatives de résolution des conflits.

À propos de Hélène de Kovachich

Hélène de Kovachich, ex-présidente du Tribunal administratif du Québec, est une experte renommée en médiation et en PRD, ayant présidé plus de 1000 médiations nationales et internationales.

Avocate, médiatrice accréditée et formatrice, spécialisée dans les conflits d’actionnaires et la restructuration d’entreprises, elle a été membre du conseil d’administration de l’IMAQ et est désormais membre de l’Académie internationale des médiateurs et fondatrice du Groupe Option Médiation, contribuant également à des programmes de médiation judiciaire réputés.

Sources pour l’article

1 Statistiques sur les conférences de règlement à l’amiable en matière civile. Période du 1er septembre 2021 au 31 août 2022. Cour du Québec https://courduquebec.ca/fileadmin/cour-du-quebec/centre-de-documentation/statistiques/CompilCRAcivil_2021_2022.pdf

2 Balado Épisode 39 : Les conférences de règlement à l’amiable : points de vue du juge et de l’avocat. Novembre 2021. Institut canadien d’administration de la justice https://ciaj-icaj.ca/fr/balados/les-conferences-de-reglement-a-lamiable-points-de-vue-du-juge-et-de-lavocat/

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